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La revue n° 55 moment critique

moment critique

À propos de The E-Symposium Quiet Drones 19-21 octobre 2020, réflexions sur les congrès électroniques

Les Colloques/Symposium

le lieu de la recherche et la raison pour laquelle cela vaut le coup de continuer ses études

 

Si les colloques de philosophes se réduisent à quelques poussiéreux spécialistes, les buffets sont toujours assez bien ficelés (quand l’hôte sait recevoir). Bien souvent, un bon colloque est en réalité un bon buffet.

VITAL : le Principe de charité : toujours supposer que la personne qui parle a toute légitimité pour parler et que l’on est soi-même extrêmement ignorant. C’est grâce à cela que l’on peut accepter d’écouter parler des gens avec des accents fabuleux et des méthodologies complètement différentes sur les mêmes sujets. C’est pourquoi, il faut pratiquer la méthode aussi rigoureusement que possible. Celle-ci, bien qu’elle semble universelle recèle de nombreuses variations qui nous permettent pour autant de comprendre de manière standardisée à la fois les présupposés mais également les calculs de chaque pays.

Le E-Congrès Quiet Drones 19-21 octobre 2020

 

Il faut tout d’abord s’orienter dans la jungle des propositions : se faire son petit parcours puisque les sessions et workshops ont lieu en même temps (d’autant plus en distantiel). Le choix arbitraire s’est porté sur les :

Session 7 Détection acoustique et identification de drones (où il est question de signature acoustique des drones), dans laquelle est intervenu Torea Blanchard du LAUM pour présenter la recherche sur la Localisation de drones à partir d’un réseau de microphones par l’exploitation de la structure harmonique du son produit. Cet article est également signé par Jean-Hugh Thomas et Kosai Raoof du LAUM.

Session 8 L’audition des drones – écouter les drones où il est question de l’aspect cognitif de l’audition des drones. Méthode MUSIC et SNR (sound/noise ratio) qui dessine les limites de l’audible par un drone (par exemple pour sauver les victimes d’un séisme).

Conférence 4 Normalisation et réglementation.

Conférence 5 Impact de la mobilité aérienne urbaine

Conférence 6 Outils pour l’analyse, la mesure, la modélisation et le contrôle du bruit.

Conférence 10 Génération et atténuation du bruit.

Discussion avec Marion Burgess, Dick Bowdler, Philippe Strauss, Jean Tourret, Andy McKenzie, Bob Hellweg, Cathy MacKenzie, Tiziano Pagliaroli, Marjam Snellen, Lourdes Camarma, Roalt Aalmoes, Gert Herold, Michael Wieland &.

Comment votre Irma s’est-elle retrouvée dans cette histoire ? Eh bien, par hasard, l’autrice voulait, pour son public, et par curiosité, voir de quelle teneur étaient les propos échangés entre grand spécialistes, sommités, que dis-je émérites de la recherche Physique Acoustique. Heureusement que votre servitrice sait se placer en retrait et reste distinguée même dans les endroits où elle n’a pas droit de cité. Si bien que sa présence ne fut même pas remarquée. Tout juste se moqua-t-on de sa maladresse dans l’écriture de son nom.

La discussion fut autour de la pertinence d’un e-congress.

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La forme distancielle est un pis aller qui nous force à réfléchir le temps d’un Congrès différemment, voire de le calquer davantage sur le temps de la recherche.

En effet, il a été montré que les participants passaient moins de temps au congrès (8h au lieu de 16). Cependant, les échanges étaient simplifiés par le format vidéo qui réduit la part d’imprévus. Pour autant, le temps passé à faire des vidéos devrait être rémunéré puisqu’il prend un temps assez fou.

Pourquoi ? (philosophie) parce qu’il n’y a pas de rupture conceptuelle physique entre le temps affectif de l’intérieur (chez soi) et le temps dégagé de contraintes (Congrès). En effet, qui dit congrès, dit temps à part : géographiquement d’abord mais également affectivement. Nous arrivons à l’hôtel : lieu neutre, non chargé d’affect. Nous sommes « vierges » de toute relation : les gens croisés sont des gens croisés à d’autres occasions, peu de collègues permanents. On revoit des gens qu’on n’avait pas vu depuis longtemps, on espère être assis à la même table que cette chercheuse qui faisait des choses vraiment intéressantes à l’autre bout du monde mais il y avait le thésard la dernière fois et on n’a pas pu lui parler. Bref, l’espace des possibles n’est pas encore saturé de prédéterminations, en termes métaphysique. Nous sommes ainsi décontextualisés, comme abstraits de notre quotidien. Le philosophe parlerait d’épochè. Nous sommes ramenés à un état monastique de continuité du savoir où notre esprit doit se conformer au programme, à la découverte de nouveauté, mais également être assuré de ce qu’il sait pour minimiser le trac lors de la prise de parole. Cet état de suspension, où l’on doit être assuré de ce que l’on sait d’une manière tellement obvie qu’elle en est intuitive pour être ouvert à la discussion et comprendre chaque point de vue de manière active, c’est cela que Husserl appelait askesis philosophique.

Or, se produit dans le corps quelque chose lorsqu’on laisse notre esprit de côté. Suivez-moi bien. Nous ne rencontrons que des esprits qui tâchent tous d’être plus brillants les uns que les autres. Cependant que nous restons incarnés. Le corps semble laissé de côté et les esprits peuvent se voir dans toutes leurs dimensions. C’est pourquoi, à notre sens, il y a comme une fonction de transfert qui s’opère : l’esprit nous plaît. Ce qui est paradoxal, car il est censé nous instruire. Mais comme il plaît en instruisant, finalement on s’amuse, de manière intellectuelle. Et l’on crée des liens, on s’attache. Pythagore dirait : on est affins.

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RESUME - Conclusion

Ce que l’e-congres enlève

Cette forme distend ces liens : il y a des média, là où ils n’existaient pas auparavant. Physiques d’abord : on est obligé de disposer d’un bon matériel, d’une bonne connexion, d’un fuseau horaire à peu près en phase avec l’heure de la réunion, de renseigner correctement les champs virtuels ce qui implique d’avoir le temps devant soi et l’habitude bien réglée. On n’écoute pas une conférence de cet ordre-là comme un podcast dans le métro, on n’arrive pas en retard, on ne fait pas autre chose en même temps sous peine d’être largué, et surtout… on prend des notes !

L’e-congrès empêche donc une part du hasard arbitraire de nous faire rater des conférences à cause d’un café qui s’éternise avec ladite chercheuse mentionnée plus haut croisée à Genève il y a deux ans. Cette sur-focalisation sur les enjeux, et l’attention portée aux discussions qui arrivent à notre oreille presque sans bruit extérieur, expliquent en partie pourquoi le temps a beau être raccourci, le contenu est de la même façon pertinent. Ou, pour le dire autrement : ce que la quantité d’heure perd, est gagné en qualité d’écoute. De la même manière, les contraintes inhérentes sont évacuées : décalage horaire, fatigue, éloignement de la sphère privée, etc. De fait, les participants sont présents : de cerveau et de corps. Ils travaillent exclusivement puisque leur sphère affective est comblée : ils sont chez eux, (avec les photos de leur chien, chat, enfant, maman qui fait la cuisine etc.) ou bien au bureau avec leurs collègues. En somme ils sont tout à leur affaire.

 

Ce que l’e congrès ajoute

Comme nous l’avons vu, l’E congrès ajoute de la qualité, un tri presqu’automatique des prises de paroles, une attention portée sur l’essentiel pourvu que le matériel suive et que les participants ne fassent pas trop d’allées et venues entre les différents salons (ce qui a pour effet de faire micro-sauter la connexion), une plus large adhésion du public du fait de l’évacuation des questions pratiques : repas, pauses café, transports, indétermination matérielle facteur de bruit.

 

Pourquoi le congrès e-Drones était bien organisé ?

Parce qu’un temps plus long que juste la durée du Congrès a été aménagé : conférences disponibles en replay, papiers sortis et distribués avant le début du congrès y compris au public lambda. En dépit d’une absence dans notre belle Capitale, les participants ont pu avoir accès aux Humanités parisiennes avec :

Des visites de Paris sous toutes les coutures (et surtout de la Haute) grâce aux drones ;

l’accès aux joyaux des musées à travers une exposition virtuelle sur Léonard de Vinci, un article sur Degas, un Google Arts et Culture sur le musée d’Orsay. Culture littéraire mais également scientifique avec : une histoire de l’aéronautique française ; sciences et techniques toujours avec les Arts et Métiers, la Tour Eiffel et la Statue de la Liberté.

Pour finir sur les prototypes de drones, les récréations musicales à partir de drones. Ce qui m’a plu c’était le libre jeu d’esprits universels autour d’une préoccupation profondément désagréable, pleine d’usages à identifier, découvrir, classer, inventer, dessinant ainsi l’esquisse de la société de demain.

Maheva Hellwig

 

Bibliographie

Acoustique

C. POTEL, M. BRUNEAU, Acoustique Générale - équations différentielles et intégrales, solutions en milieux fluide et solide, applications, Ed. Ellipse collection Technosup, 352 pages, ISBN 2-7298-2805-2, 2006 .

 

Philosophique (par ordre chronologique)

E. Sylvia PANKHURST, Delphos ; the future of international langage, édition numérisée, New York EP Dutton, Plymouth. Disponible à https://archive.org/details/delphosfutureofi00pankuoft/page/n1/mode/2up consulté le 22/10/2020.

Edmond HUSSERL, La terre ne se meut pas, éd. Minuit, 1989, Paris. http://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-La_Terre_ne_se_meut_pas-2124-1-1-0-1.html.

Michel SERRE, Hermès I – La Communication, pp 10-35, Éditions de Minuit, Seuil coll. Points, 1969, Paris.

Cornélius CASTORIADIS Interview Sur la libido sciendi
http://1libertaire.free.fr/castoriadis11.html consultée le 23/10/2020.

 

Sitographie

Thème de James Bond par drones en milieu semi anéchoïque : https://www.youtube.com/watch?v=_sUeGC-8dyk.

Chatcoptère : https://www.youtube.com/watch?v=Nu-GR8ZhxxY .

Nigel Stanford : Cymatics : robots and music : https://www.youtube.com/watch?v=bAdqazixuRY .