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Allan Graubard - Pas dans Woodland Forest

Extrait du livre FOULÉE SOLEIL LAC NOIR par John Welson (peintures) et Allan Graubard (textes) - trad. G&J - Éditions Lpb
Pas dans Woodland Forest
Il n’y a pas de premier pas. Un pas en prolonge un
autre. Et la forêt disparaît au fur et à mesure qu’ils
s’accumulent. Un rivage lointain avec des vagues qui
s’écrasent scintille dans un croissant de lumière. Ou
bien la silhouette des flèches de la ville, rectangles
verticaux sombres, pentagrammes, pyramides,
parallélogrammes, arches et dômes, marquent la
transition ; cette zone intermédiaire où les animaux
gagnent en rapacité humaine et les humains en
force animale. Ou bien la hauteur recule derrière
la hauteur dans la distance jusqu’à la brume qui
les obscurcit, pinacles sculptés par le désir et
la mémoire. Et les pas de se multiplier, ascèse
exponentielle dont les coordonnées culminantes
s’inversent – l’ouest devient l’est, le nord le sud,
puis s’effondrent; l’espace vide le temps, le temps
noie l’espace et son improbable impossible pulpe
sucrée d’absence... ces tourbillons au milieu des
mers, ces sels tombés de comètes polaires, ces
ganglions jaillissant de baisers amers dessinent à
l’encre bleue la forme du pied qui passe de la forêt à
l’affleurement suivant, pituitaire, de rochers massifs
et glamour, équilibrés sur d’archaïques dés sculptés
dans des défenses de spectres desséchés et la
couronne des âges en poussière étincelante…
Il n’y a pas de premier pas. Le voyage serpente
en blessures, ondulations, abroge, embrasse, sculpte,
confie, se méfie, encombre, mélange, conforte et
abuse et strie les croûtes sans levain qui se dessinent
au crépuscule dans ce grand havre microbien où
les mots pullulent et les ombres arborescentes, les
nocturnes complémentaires, irradient les embruns
consensuels et autres divinatoires légendes gravées
sur les anciens murs des bains publics.... où se termine
la forêt...
Allan Graubard
Trad. G&J
Woodland Forest Step
There is no first step. One step follows another. And as they add up the
woodland ends. A distant shoreline with crashing waves glitters in the
gaining light. Or the silhouette of the city’s spires, dark vertical rectangles, pentagrams, pyramids, parallelograms, arches and domes mark the transition; that interzone where animals gain human avidities and humans animal strength. Or height upon height receding into the distance until haze obscures them, pinnacles carved by desire and memory. The steps multiply, an exponential ascesis in whose culmination coordinates reverse — west become east, north south – then collapse; space gutting time, time drowning space and the improbable impossible sweet pulp of absence...
these gyres amidst swirling seas, these salts fallen from fleece comets,
these ganglions sprouting from bitter kisses outline in blue ink the shape of the foot that steps from the woodland to the next outcropping, pituitary and glamorous, massive boulders balanced on archaic dice carved from tusks of desiccated spectrums and wiry aeonic crowns of sparkling dust...
There is no first step. The journey winds, wounds, ripples, rattles,
abrogates, embraces, carves, entrusts, distrusts, congeals, commingles,
comforts and abuses and striates the unleavened crusts that dusk shapes in this grand microbial haven where words pullulate and arboreal shadows, supple nocturnes, irradiate consensual spindrifts and other divinatory captions carved onto ancient bathhouse walls.... where the woodland ends...