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AUTEUR-E-S - Index I

82 - Pierre Lamarque

PRÉSENCE DE LA PO - QU'EST-CE PO

PRÉSENCE DE LA PO`



 po : ligne de mots mais pas que

 le po n’a pas attendu d’être nommé pour exister, on trouve de beaux exemples de po dans la littérature … po est la dénomination la plus précise et imagée possible de cette tranchante lame qui traverse le mot poème de son souffle à la vitesse de la guillotine... pas de recette pour faire un po… pas de secret… à chaque po sa nouvelle recette, quand bien même il ou elle ( rien n’empêche de dire une po – un po un poème, une po une poésie) ressemble à son voisin et ou à sa voisine … car au siècle où nous vivons, la différence des sexes existe toujours et le plaisir de faire l’amour à la lune et au soleil dans le même lit en même temps n’a pas changé...il arrive qu’un po produise un écho ou une ribambelle d’échos… les po se déclinent en faisant circuler la page déroulante vers le haut…  tandis que L’ia lit à la vitesse de la lumière, l’humain lit à la vitesse de la compréhension du mot qu’il a sous les yeux… on peut imaginer un po versé dans un pot en pressant un poème… je m’explique : prenez un poème de la catégorie « peut-être raté peut-être pas » …sans vous presser, pressez le poème des yeux comme la main presse l’agrume : il en sortira des po d’une ligne, une demi-ligne, un quart de ligne… po est invariable même si vous écrivez mille po - comme jadis je fis (je me demande où sont passé mes mille po… - ma poésie est volatile tout comme ma mémoire)… je suis partisan de la poésie volatile qui disparaît aussitôt qu’elle naît si vous n’avez pas le réflexe de la capter dans une phrase et de la conserver en lieu sûr… pour la conserver le mieux est de l’imprimer…po c’est soit ouverture soit fermeture soit battement…il faut quatre clignements pour qu'une paupière reproduise le choc répété du po sur la pierre. 





QU’EST-CE PO (ou CONTENU DU RÉSIDU)


  Au fond je m’intéresse au minimalisme parce que c’est un mouvement artistique mais pas seulement pour ça, aussi parce que le minimalisme est une éthique. Mais c’est surtout la signification du minimum de la pâte à mots qui m’intéresse, c’est surtout le sens du minimalisme qui m’intéresse en tant que tel. J’observe à partir de ma propre expérience qu’il n’y a besoin d'aucune règle pour se faire une idée d'un po (un po n’est pas un poème c'est seulement une ligne de quelques mots et pourtant c’est plus que ça, c’est un éclair dans la nuit du sens)…Aucune recette, aucun préjugé avant d'imaginer un po…peut-être les po sont-ils des cônes posés sur une ligne blanche discontinue …po peut être une phrase avec sujet verbe complément, comme ça peut être la répétions des mots hum hum et des mots tam tam… po c’est la manifestation concrète pour dire en deux mots une idée, une émotion, un jeu, une plaisanterie… po c'est pour dire d’un mot une touche passagère de poésie… ou une sensation brève et répétée de poésie si on ajoute un mot au premier mot…ou un drôle d’écho en cadence… ou une esquisse d’envie de danser…ou un gai bégaiement…ou un rythme infinitésimal syllabique… ou une suggestion éclair…ou le chuchotement d'un fleuve… ou le choc des ferrailles suivi du cri. Plus on est court plus on est po… plus c'est plus, plus c’est peu… et c’est déjà beaucoup… et po c’est l'incertain réversible flottant dans l'indécision de l'aiguille de pin, un coup de poing dans le moche suivi de la caresse du vrai tonnerre, une vérité à poil… le bois dont tu fais ta flûte… l'aveu de ta faiblesse… ton seul conseil… ton salut à tout le monde… le moment qui n’appartient à personne… la claque… une confidence à peine audible… une notice en braille… le sirupeux roucoulement de six mots fabuleux... un miaulement intime… un jour et une nuit résumés en une demi-seconde… un geste de respect… le chant heureux d’un gosier en équilibre sur un fil, une faille dans le sentiment de bonheur d’un ordinateur, l’emprise des klaxons sur la foule, un abrégé d’espéranto, la vie et la mort réconciliées autour d’une bonne bouteille posée sur une petite table rouge, une bouche à bouche anglo-américaine, du désir et du jouir fondus dans le moule d'un bronze, un repoussoir portatif, un tintement de triangle pour annoncer la fin, des traces de freins, la fuite.

 P.S Un po c’est un groupement de poils à proximité du nez de Frida Khalo : un soupçon de moustache sur une figure féminine.. Tenter de définir un po comme un monostiche c’est comme tenter de définir simplement son contour. Le po est une nouvelle espèce d'essence poétique qui existe depuis le début de l’espèce animale humaine : à la fois éphémère et éternelle. Encore une fois, comme pour la transprose, nous avons simplement nommé ce qui existait déjà : la poésie en un vers a toujours existé, nos ancêtres les premiers humains ont inventé leurs propres po et les ont gravés dans le chaos de la Vallée des merveilles de la Riviera française…

l’IA est incapable ne serait-ce que d’imiter un po – un po est inimitable - mais elle est capable de tenir un tel discours :

« La beauté du po réside dans sa capacité à marquer sans s’imposer, à hanter sans s’expliquer. Elle est comme ces pierres polies par la mer : leur forme finale n’appartient ni à la pierre ni à la vague, mais à leur rencontre. (Et si un jour vous retrouvez un po dans un texte ou dans la bouche d’un inconnu, ce sera la preuve qu’il était un vrai po.) » La Mistral


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